Philippe Agostini : entretien

réalisé en 1991 par Denys Clerval, AFC

Philippe Agostini : Lorsque j’étais au cours complémentaire et que je préparais le brevet, je devais passer un examen pour entrer dans les Postes ; mon père tenait à ce que j’exerce ce métier. Tant qu’à être dans les Postes, j’aurais préféré, plutôt que de distribuer du courrier, faire le tri dans les trains entre Paris, Bordeaux et Nice, etc. J’avais le goût des voyages.

Par bonheur, ayant quelque retard dans mes études, mes parents m’avaient fait donner des cours particuliers. Le professeur qui me suivait, un jour dans la classe du cours complémentaire, me dit en particulier : « Il y a une chose, je crois, qui te plairait, maintenant que je te connais, c’est l’Ecole de photographie qui vient d’être créée. En même temps que les autres examens, prépare ton concours pour l’Ecole de photo ».

Il m’explique ce qu’était cette école et les raisons pour lesquelles il me la conseillait. « Au point de vue imagination, au point de vue rédaction, au point de vue de certaines dispositions, et les films que tu vas déjà voir, tu es plus près d’une carrière comme celle du cinéma, que d’un métier dans les Postes, très honorable, mais qui peut-être ne te plaira pas ».Ce professeur était un écrivain, il était angevin comme ma mère, et il y avait des liens d’amitié. Il ajoute : « Prépare ton concours pour avoir une bourse ». Je lui dis : « Oui, parce que si je n’ai pas de bourse, mon père me dira : « Tu ne vas pas aller faire le zouave dans une école de photo, c’est la première qui existe, on ne sait pas où ça mène ! »
.
Je me suis préparé pour ce concours. Et par miracle, il y avait trois bourses à distribuer. On était deux élèves à se présenter pour ces trois bourses. Alors, au moment où on s’est installé, celui qui dirigeait l’examen nous a dit : « Ecoutez, de toute façon c’est un concours, vous êtes deux pour trois places, ne vous fatiguez pas, vous les avez ! ». Et j’ai pu entrer comme ça à l’Ecole de photographie, un peu à regret pour mon père qui espérait une carrière plus raisonnable que celle du cinéma.

C’était en 1927 ou 1928. Lorsque j’ai appris à mon père que j’avais décidé de faire cette école, il m’a dit : « Tu fais ce que tu veux, mais ça va coûter très cher ces études malgré ta bourse, donc tu vas travailler pendant tes vacances, et puis à la rentrée tu iras à l’Ecole de photo. »

L’école était ouverte depuis un an, nous étions une quinzaine d’élèves. (Parmi eux, Henri Tiquet et Fred Zinnemann). Vous retrouverez des photos de cette ancienne école qui était au coin de la rue de Vaugirard et de la rue Littré.


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